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En deux décennies, l’homme d’affaires israélien Dan Gertler est devenu milliardaire en République démocratique du Congo (RDC), sa « deuxième maison » comme il dit. Dans cet immense pays d’Afrique centrale, il a connu les guerres et s’est lié d’amitié avec Joseph Kabila, l’ancien chef de l’Etat (2001-2019) – une proximité utile pour ses acquisitions minières et pétrolières. Le successeur et allié de M. Kabila, Félix Tshisekedi, à peine proclamé vainqueur de l’élection présidentielle en janvier 2019, a rencontré Dan Gertler et s’interdit de le critiquer en public.
Pourtant, avec ses circuits financiers offshore tortueux, le tycoon israélien – qualifié de « pilleur » des richesses extractives congolaises par des ONG locales et occidentales – aurait fait perdre plus de 1 milliard de dollars de revenus à l’Etat, dans un pays qui compte parmi les plus pauvres de la planète. Sa fortune (1,2 milliard de dollars en 2020, selon le magazine Forbes), il l’a amassée « grâce à des opérations minières et pétrolières opaques et corrompues portant sur des centaines de millions de dollars en RDC », selon le département du trésor des Etats-Unis, qui a décrété des sanctions économiques en décembre 2017 contre l’homme d’affaires, lequel conteste cette accusation. Six mois plus tard, quatorze de ses sociétés et véhicules financiers offshore ont été visés à leur tour par les autorités américaines. Il lui est désormais interdit de manipuler des dollars, la devise des affaires en RDC.
Pourtant, Dan Gertler n’a pas cessé d’opérer à Kinshasa. Dans la plus grande discrétion, il a restructuré son empire en recourant à de nouvelles sociétés-écrans, à des prête-noms et aux services d’une banque peu regardante. C’est ce que révèlent l’ONG britannique Global Witness et la Plateforme de protection des lanceurs d’alerte en Afrique (Pplaaf), une organisation établie à Paris. Leur rapport est rendu public jeudi 2 juillet malgré les pressions et intimidations exercées par les conseils de Dan Gertler contre les ONG, leurs avocats et la presse.
Des millions de dollars en espèces
Tout démarre début 2018 dans la capitale congolaise, soit quelques semaines après l’annonce des sanctions américaines contre lui. Dan Gertler et un autre homme sont vus chez Afriland First Bank, chargés de sacs remplis de millions de dollars en espèces. Ils s’enferment à l’étage, dans le bureau du directeur général adjoint de cette filiale congolaise d’une banque camerounaise, selon plusieurs témoignages recueillis par Global Witness et la Pplaaf. L’un des témoins a confirmé et raconté la scène au « Monde Afrique », avec force détails.
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