Lettre de la Santé publique sur François Blais: «On est allé un peu loin», admet Dubé

«Je pense que le suicide c'est toujours un sujet qui est excessivement délicat. Je peux comprendre pourquoi la Santé publique à pris cette [position], mais je pense qu'on est allé un peu loin», admet Christian Dubé. 

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, pense que la Santé publique «est allée un peu loin» au sujet du dernier livre de François Blais, Le garçon aux pieds à l'envers, dans lequel il est question de suicide.


«Je pense que le suicide c'est toujours un sujet qui est excessivement délicat. Je peux comprendre pourquoi la Santé publique à pris cette [position], mais je pense qu'on est allé un peu loin», a admis Christian Dubé en mêlée de presse. 

Une lettre de la Santé publique adressée notamment aux directeurs de santé publique demande aux professionnels du milieu scolaire de ne pas parler ou promouvoir le dernier roman de François Blais, car il aborde la question du suicide.

«La lecture du roman pourrait affecter les jeunes présentant des vulnérabilités. Ces derniers pourraient notamment adopter des comportements suicidaires par imitation.»

On ajoutait : «Il est capital de ne pas attirer l’attention et la curiosité du public sur ce livre. Ainsi, il est recommandé d’éviter les communications aux médias ou au grand public sur le roman», indique-t-on dans la lettre dont le Soleil a obtenu copie.

«Pour moi, la liberté de presse et la liberté d'expression c'est important», a ajouté le ministre de la Santé. 

Questionné à savoir s’il était d’accord avec son collègue de la Santé, le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant a répondu : «Est-ce que ça va trop loin ? Je ne suis pas certain. Je crois qu'il faut quand même sensibiliser les gens aux risques du suicide.»

Le cabinet du ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a indiqué : «nous ne produisons pas de liste d’œuvres “approuvées” en raison de l’évolution constante de la littérature et pour protéger la liberté d’expression. Il revient aux enseignants de faire des choix en fonction des objectifs d’apprentissage. Toutefois, nous sommes d’avis que ce type de roman doit être utilisé avec prudence, comme le font les enseignantes et les enseignants lorsqu’ils font leur choix de lecture.»

Le ministre de la Culture, Mathieu Lacombe, a affirmé, quant à lui, qu’il faut être prudent lorsqu’il est question de la liberté créatrice des artistes. «Je crois dans le jugement de ces derniers pour être conscient des répercussions que leur art peut avoir sur le public. J’ai aussi une grande confiance dans le jugement et l’accompagnement des enseignants ou des intervenants en milieu scolaire pour faire face à ce type de lecture», a-t-il indiqué par écrit. 

Pour sa part, le premier ministre François Legault a dit qu’il fallait être prudent avec la manière dont on abordait le suicide. «Le suicide chez les jeunes, c'est un sujet qui me préoccupe et qui m'attriste [...] Par contre, il faut protéger la liberté d'expression», a-t-il affirmé.

«Mettre un livre à l'index est totalement injustifié»

Le Parti québécois soutient que l’approche de la Santé publique n’est pas la bonne. «Le suicide est un sujet très délicat qu’il ne faut surtout pas banaliser. Or, mettre un livre à l'index est totalement injustifié. C'est plutôt par le dialogue, en ouvrant la discussion que les enseignants notamment peuvent intervenir, accompagner et encadrer les jeunes face au phénomène du suicide», a dit le porte-parole du Parti Québécois en matière de Santé, Joël Arseneau. 

La lettre de la Santé publique fait nommément référence au fait que le livre de François Blais  «a été publié à titre posthume après que l’auteur se soit suicidé en mai 2022».

La missive avait soulevé l’ire de la maison d’édition de l’auteur, Fides. Dans une lettre, elle affirme que les autorités «s’autorisent ainsi à faire quelque chose que nous, la maison d’édition, dans un souci éthique, nous sommes abstenus de faire dans la promotion du livre : diffuser largement ce qui a conduit l’auteur à sa mort.»

Le milieu littéraire a aussi fortement réagi à la lettre. Certains acteurs comparaient même le geste de la Santé publique à de la censure.    

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